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FARONA
Ville corrompue ?


M.J. Nonogre
P.J. Olfias ; Zenekyn Kahan ; Briselame
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Illustrations : Claire Salvatori
Sommaire :
 Acte I : Que la Fête commence !
 Acte II : Levée de Rideaux...
 Acte III : Quand Noxe déjoue le Masque

 
 
 
 
 
 
 
 



Acte I :
Récit : Zenekyn Kahan

Que la fête commence !

Alors qu'Olfias, le satyre diplomancien affublé de son diablotin infernal et Zenekyn Kahan le forgeron ensorceleur ne se connaissaient que très peu (de réputation tout au plus), il leur fut permis de recourir à ce grave manque en se rencontrant à l'Hostellerie de la Magnificence à Lorgol (surtout quand tous les frais sont payés par de mystérieux émissaires de la ville... Merci messire de Hauteplume !)
 

1. Soirée chez Sire de Loguenade

Olfias le Satyre "diplomancien" et moi-même (plus connu sous le nom de "Zen l'Ensorgeron") étions conviés à une réception chez Sire de Loguenade à Lorgol. Soirée d'été agréable dans les riches jardins et les salons peuplés d'individus atypiques et intéressants. Sire de Loguenade ne tarda pas à nous présenter Mesphalte, messager personnel de Sire Yoren, Baron d'Andride, au nord-est de Lorgol afin de nous remettre une missive de la part d'"un ami commun" :

"Mes amis, besoin urgent de votre présence à Andride. Présentez vous à Sire Ozekian, Premier Intendant du Baron Yoren." Memneth

Prévoyant un départ dès le lendemain matin, nous nous attardions cependant un peu à la soirée de Loguenade.
Intrigués par un "Encenseur" Keshite et son fabuleux "fumoir" en verre autour duquel bon nombre d'invités se pâmaient sous l'emprise des rêves provoqués par ses mystérieuses essences (drogues que tout ceci !), Olfias se renseigna : le Keshite lui permit de choisir une essence et de s'essayer au songe qu'elle provoquerait. Il choisit les arômes des Jardins suspendus de Keshe, riches en parfums et senteurs. Le Keshite jeta alors au centre du bulbe de verre orné de multiples trompes un ingrédient de son secret qui anima le vaporeux mélange. Le Keshite proposa alors une des trompes à Olfias qui respira le mystérieux éther, bien calé dans les fauteuils de velours de l'alcôve où se trouvait l'attraction. Le songe le propulsa au dessus des jardins suspendus de Keshe qu'il survolait, attiré par une étrange litanie vocale et mélodieuse...

Sortant de son mystique envol, Olfias rejoignit l'assemblée d'invités dans le jardin pour se livrer à son occupation favorite, la chasse à la courtisane (cendrée). Plus tard, alors qu'il tentait de semer une cohorte de jeunes courtisanes émoustillées par ses prouesses à "cache-cache" autour de la fontaine (ce qui ravissait son diablotin qui se chargea de compléter la collection de sous-vêtement féminins de son maître), Olfias, les yeux bandés (cache-cache oblige !), fut attiré par les sonorités ressemblants à la litanie vocale qu'il avait entendu précédemment en rêve.  Se dirigeant vers l'origine du chant, puis le perdant, il retira son bandeau et se retrouva devant une étrange silhouette encapuchonnée, assise sur un banc du jardin.

Pendant ce temps, je dus me contraindre à "mondaniser" quelque peu (business oblige, j'ai un métier moi !) et fut présenté à Merkeder, Maître d'Armes d'Agone de Rocheronde (pas moins), qui semblait avoir déjà entendu parler de moi (le flatteur). Merkeder me fit part de son désir de posséder un jour une épée alliant la force du métal aux couleurs du combat, octroyant ainsi puissance, confiance en soi et inspiration (mélangeant l'art de la cyse à celui du décorum pour être plus clair). Relevant le défi d'une telle œuvre, je pris l'empreinte de la poigne du Maître d'Armes en prenant soin de lui démontrer la précision et l'habileté de mes gestes (faut bien vendre quand même).

L'étrange silhouette qui se trouvait assise sur le banc en face d'Olfias, à l'endroit même ou l'étrange litanie disparut, s'avéra être une femme (ô joie pour Olfias) qui semblait faible et s'enquit de Sire de Loguenade. Olfias (comme tout bon Satyre dévoué à la gent féminine), s'empressa de faire mander un page pour solliciter De Loguenade. Celui ci reçut l'étrangère à huis clos, mais Olfias put cependant l'accompagner dans la salle secrète ou elle fut conduite, sous le très discret (pour ne pas dire invisible) contrôle du contre assassin de Loguenade. La discussion fut brève et quasi imperceptible [cf. Olfias] 


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2. Voyage vers Andride

Après les nombreux verres de vins (grands crus bien sûr) et autres poignées de mains et courbettes en tout genre (je hais les mondanités), nous dûmes consentir à retourner à l'Hostellerie de la Magnificence (dont nous fûmes les hôtes, ce qui n'est pas pour déplaire) afin de préparer notre départ dès le lendemain matin pour Andride. Ne possédant qu'une carriole encombrée d'instruments et matériaux de forge, tirée par deux chevaux, je consentis à embarquer Olfias sous réserve que son farfelu petit compagnon cornu (un autre point commun entre eux) en préserve l'ordre et l'intégrité sous peine de remodelage de faciès !

Quelques jours après notre départ, nous fîmes halte dans la forêt d'Andride pour y passer la nuit. De violents orages sévissaient dans la région ; nous ne pûmes y échapper : la tempête semblait se déplacer dans le sens contraire du vent et nous tomba violemment dessus. J'attelai vigoureusement ma carriole et mes chevaux pour nous abriter non loin sous une tente de fortune. Au beau milieu de l'orage, un cavalier apparut sur le chemin d'où nous venions, venant d'Andride et semblant suivre la tempête, ne la craingnant apparemment pas. Me rendant à sa rencontre, luttant contre le vent et la pluie, je l'arrêtai pour lui proposer mon abri ; il ne répondit point et ne semblait pas s'y intéresser... pas à l'abri lui-même en tout cas : à l'arrêt sur son immense palefroi, brandissant un grand fanion arborant un blason inconnu (que j'ai pris soin de noter), il regardait fixement dans la direction de l'endroit où Olfias se réfugiait, me rabâchant qu'il devait délivrer un message et me demandant si j'étais le destinataire. Étonné qu'un messager puisse ignorer à qui il devait remettre sa missive (on confie ces petits boulots à n'importe qui de nos jours !), je lui demandai de préciser qui en était l'expéditeur. Il répondit simplement qu'il est le Messager de Noxe et qu'il lui fallait remettre son message (ha hui ? et ça vous plaît ce job ? sic !!). Naturellement je répondis qu'il devait se tromper de client. Il reprit sa route (lâche ! reviens !). L'orage cessa peu de temps après son passage.

Reprenant la route en direction d'Andride, nous croisâmes peu de temps après une petite armée de fantassins arborant l'emblème du Cryptogramme Magicien et pourchassant apparemment le sombre messager (dont je leur indiquai la direction et le temps qui les séparait).
La veille de notre arrivée à Andride, nous fîmes une dernière halte en forêt, accueilli par un campement de bûcherons à qui j'appris quelques techniques d'entretiens et de perfectionnement d'armes afin de préserver leurs haches et d'en tirer le meilleur bénéfice. Ils me remercièrent en me conseillant et m'offrant certains matériaux en bois fins et précieux qu'ils détenaient pour la conception d'un arc composite et (surtout) pour préparer la commande que Merkeder m'avait confiée.

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3. Arrivée à Andride : la mission

Arrivant le soir suivant au pied de la ville fortifiée d'Andride, nous fûmes accueillis par Sire Ozekian, Premier Intendant de Sire Yoren Baron d'Andride, qui nous montra nos chambres et nous conduisit auprès de Memneth qui nous expliqua rapidement la situation : devant escorter un mage corrompu pour jugement à Lorgol, l'ogre Censeur (membre de notre fière et valeureuse compagnie) a requis notre assistance afin d'enquêter, en son absence, sur des faits étranges sévissants à Farona, village d'environ six cents habitants au Nord Est d'Andride. Felagh, le mage corrompu actuellement détenu dans les geôles de la forteresse d'Andride aurait utilisé des danseurs (sic) de nature inconnue et s'en serait servit à Farona ou règne désormais le chaos : la rivière y coule à l'envers, le puits du village n'a plus de fond, une échoppe est plongée dans l'obscurité permanente, certains villageois perdraient la raison, etc. De fait, la ville est maintenue sous une sorte de "quarantaine" imposée par la milice d'Andride qui contrôle les entrées et les sorties mais ne se risque pas à l'intérieur.

Memneth nous confia que le mage corrompu semble être sous l'emprise de forces étrangères car la démence lui a ôté toute raison. Scellé à sa cellule par des chaînes, privé de danseurs capturés par le censeur (bien fait !), ses propos ne pourront nous être d'aucune utilité car dénués de sens. Le seul mot qu'il évoque assez régulièrement est celui d' "Heliotron", nom qui m'est familier et que je m'empresserai de vérifier auprès de mes protecteurs de l'Équerre (dont l'Ordre est présent à Andride) dès demain. Olfias s'étant absenter pour récupérer de son fatiguant (et surtout douloureux) voyage dans ma carriole, Memneth et moi eurent une longue et passionnante discussion sur les arcanes du Cryptogramme magicien et autres institutions et sociétés secrètes.

Memneth conclut en nous demandant d'enquêter sans tarder sur les mystérieuses manifestations qui se généralisent à Farona (et de les faire cesser dans la mesure du possible) car nos conclusions serviront aussi à l'enquête qu'il menait sur la culpabilité du mage Felagh. Devant ainsi partir dès le lendemain matin pour escorter son prisonnier afin de le confondre auprès du Cryptogramme magicien de Lorgol, Memneth nous encouragea à user de la plus grande prudence quant à notre enquête à Farona (même pas peur !).

(fin 1ère séance)

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Acte II :
Récit : Zenekyn Kahan

Levée de Rideaux...

Dès le lendemain matin, Olfias et moi étions attendus dans une des grandes salles du château pour une dernière réunion avec les représentants des autorités de la baronnie : le Capitaine Gontran de Narval, officier du Baron en charge du périmètre de sécurité autour de Farona, Memneth (qu'on ne présente plus), le Baron Yoren d'Andride et Ozekian, son Premier intendant.
Un septième invité siégeait autour de la grande tablée de la salle de concile (aux atours tout aussi austères et massifs que la façade de la bâtisse guerrière... - appelez moi le décorateur - songeai-je) : un nain en cotte de maille arborant une hache de très belle facture. Memneth nous le présenta : "Briselame le Mercenaire"... Méditant à ce nom, j'en vins à me rappeler la Compagnie Druelle qui s'illustra au cours d'une bataille fastidieuse, glorieusement menée par ce mercenaire. Remercions les Muses de la providentielle compagnie d'un fameux guerrier !
 

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1. L'Équerre à Andride

Après un rappel des faits et quelques précisions concernant la mission qui nous attendait, je décidai d'aller vérifier les quelques éléments qui me préoccupaient avant de partir pour Farona, pendant que mes deux compagnons s'assureraient de la qualité des caves du Château d'Andride ou que notre poète d'Olfias, saltimbanque de ces dames à ses heures perdues, ne déclamasse quelque sulfureuse prose à Dame Illiana, fille du Baron qui n'en fut pas moins émue et le supplia de participer à son anniversaire dès le lendemain soir... - Courage Olfias mon ami, on ne coupe plus les têtes pour manquement à l'honneur dans ce monde... Au pire on est exilés ! -

Je me rendis en hâte à la discrète demeure de l'Ordre des Nains de l'Équerre qui m'accueillit tel un des leurs, comme à l'accoutumée, de façon d'autant plus courtoise qu'un de ces formidables orages était en train d'éclater. Ma requête fut validée : Ogul, doyen de cet ordre et mémoire de la confrérie, bibliothécaire de son état, fera les recherches demandées concernant l'Heliotron, "objet" évoqué par Felagh, le mage renégat dans ses délires et qui semble être au cœur de l'intrigue de Farona. J'appris également que Méfranc, un espion de l'Ordre était infiltré à Farona et qu'il me ferait parvenir les réponses que j'attendais. L'Ordre de l'Équerre avait réalisé quelques œuvres à Farona, comme le vieux Manoir en bordure du village et une très ancienne tour de guet. Il nous faudrait les visiter.
 

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2. Sombre tempête

Pendant ce temps, alors que l'orage se rapprochait considérablement, Olfias et Briselame entreprirent de l'observer de plus près (ha ses jeunes aventuriers qui découvrent les lois de la nature... ou peut-être celles des Dames des saisons).
Olfias se fit avancer une calèche pour se rendre au centre de Farona qui semblait devenir l'épicentre de l'orage.
Briselame quant à lui voulu défier la tempête en s'encordant au créneau d'une des plus hautes tours du château (au hasard celle de la terrasse privative du baron). Rudement amarré à un créneau, il put vérifier une célèbre théorie de physique des forces : tout volume dont le poids est inférieur à la vitesse du vent, s'élève dans les airs... un cas d'école ! Notre nain mercenaire eut certainement la chance de pouvoir goûter aux sensations qu'un volatile peut ressentir quand il tente de voler face au vent : il fait du surplace (remercions les cordes de l'avoir retenu... ça aurait fait désordre).
Olfias se fit donc conduire par le cochet du baron (dont le physique devait certainement être des plus disgracieux pour se dissimuler le faciès de la sorte) qui le déposa en ville pour se hâter d'attacher les montures et se mettre à l'abri. Tentant de lutter contre la tornade, Olfias put lui aussi vérifier cette même théorie de physique que son compagnon, mais sans cordes... ça a fait désordre : une bourrasque l'empoigna telle une main géante, l'éleva et le propulsa contre un mur proche (trop proche). Groggy, il se releva et découvrit la silhouette que nous avions aperçue la veille en forêt... le prétendu Messager de Noxe qui se pencha du haut de son palefroi pour s'adresser à Olfias :

"Es-tu celui pour qui je marche ? - demanda t'il d'une voix tout droit sortit des profondeurs des ténèbres.
- Bin... si tu cherches Olfias, c'est possible..
- As tu entendu les chants de Mélopée ?
- Ha... Mélopée dites-vous ? C'est bien possible aussi, je n'ai pas eu l'honneur d'être présenté.
- L'Heliotron se trouve à Farona, sers-t'en pour servircelle qui charme les Ténèbres. Ofram sera ton Champion."

Le "messager" fit faire volte-face à sa monture et s'en retourna, laissant Olfias pantois.
Récupérant sa canne, son cochet et sa calèche, il reprit route vers le château du Baron.

Durant ce temps, alors que l'orage avait cessé et que Briselame avait dut mettre un terme à ses expériences de physique des forces, nous nous retrouvâmes et, en attendant Olfias, entreprirent une petite visite du château avec la permission du Baron. Mes amis de l'Équerre m'ayant informé que certaines anciennes parties du bâtiment avaient été érigées par leurs soins, nous vaquâmes en quête de leur œuvre dans les soubassements, guidés par un jeune chambellan. Découvrant enfin le sceau de l'Équerre à l'entrée de ce qui semblait être l'ancienne salle du trône et voulant y pénétrer, nous fumes prévenus par notre guide :

"Hum, Messires, je crois qu'il est impossible d'aller plus loin... enfin, disons qu'il vous faut la permission de Staedler, le gardien des lieux..
- Dans ce cas nous allons lui demander, ou est-il ce Staedler ?
- Bin... derrière la porte, s'il daigne répondre"

Nous frappions, attendions quelques instants avant que des pas sourds ne semblent se rapprocher. De multiples cliquetis résonnèrent et la massive porte en bois s'ouvrit pour laisser entr'apercevoir un Minotaure :

"Que voulez-vous ? - nous lanca t'il de sa voix grave.
- Bonjour Messire Staedler, nous souhaitions contempler ce magnifique lieu - me risquai-je. C'est alors que je sentis une sensation étrange émanant de la salle, comme une sorte d'enchantement...
- Ce n'est pas possible, revenez plus tard.
...et la porte se referma sourdement devant notre nez. Nous dérangions certainement. Nous ferons donc ainsi : nous repasserons.
 

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3. Farona l'ensorcelée

Olfias, le Capitaine Gontran et quatre de ses hommes nous ayant rejoints dans la cour du château, nous nous préparâmes à embarquer pour Farona, sous l'œil prévenant du cochet du Baron qui m'avertît de quelques menues réparations à faire sur ma carriole (merci Bétune).

Une heure environ de route jusqu'à Farona nous permit de nous renseigner sur les derniers faits y ayant eu cours :
. une troupe d'amuseurs comptant six saltimbanques était arrivée la veille et préparait une représentation théâtrale au centre du village ;
. un colporteur, marchand nomade connu dans la région sous le nom de Youg, était passé la veille du début des événements à Farona, disparut depuis ;
. nous n'aurions point d'escorte de la garde en ville, tenue à respecter le cordon de quarantaine autour de Farona ;
. le chambellois du Village se nomme Ganth ;
. une seule auberge pourrait nous loger, celle-là même dont les couleurs ont viré aux nuances de gris (réjouissant).

Dès notre arrivée à Farona, nous requîmes Gant le chambelois (maire intendant). Nous nous présentâmes à lui. Un bon gars bien bourru de l'Urguemand profond (mais ne soyons pas hautains, la simplicité paye plus que le snobisme et il nous fallait nous intégrer aux villageois pour en tirer toute information susceptible de libérer les lieux de l'étrange emprise qui y pesait).

Nous nous présentâmes donc très officiellement comme envoyés du Baron pour régler les troubles du village. Gant en fut étonné mais ravit et ne manqua pas de nous présenter, quelques heures plus tard, sur la grand-place du village à l'assemblée des habitants. Avant cela, Olfias trouva la compagnie d'une petite bande de gamins du village à qui il proposa (pour ne pas dire "commerça") de se renseigner par quelque moyen que ce soit pour tenter d'identifier un objet hors du commun (l'Heliotron) quelque part dans le village, dans les demeures des habitants ou partout ailleurs. Les gamins acceptèrent, excités par la mission.

Pendant ce temps, Briselame et moi allions traîner du côté de la petite troupe de théâtre qui s'installait l'après midi avant leur première représentation le soir même. Curieux moment pour aller amuser la galerie alors que la population semblait totalement désemparée et bien plus préoccupée par les troubles qu'ils subissaient plutôt que par la distraction et l'amusement. Mais au fond pourquoi pas, c'est dans ces moments là que le public peut avoir le plus besoin de s'évader (private-joke).
Briselame fouina de son côté et alla frapper à la porte du chef de la troupe, un dénommé Ezekiel. N'ayant eu pour seule réponse qu'un lointain :

"...Quoi ?! Mais qu'est-ce que c'est ?! Plus tard, plus tard, je me prépare que diable ! - Briselame fit tout de même irruption.
- Et bien ! Ne vous gênez pas surtout ! Je ne reçois personne, les autographes ce sera après la représentation, au revoir !"
- Bonjour, je suis Briselame, envoyé par le Baron Yoren pour enquêter sur les troubles de ce village...
- C'est bien, c'est bien mon garçon, aller, du balais !
- Dites-moi, d'où venez vous et pourquoi vous êtes vous arrêter ici ?
- Mais enfin, mOsieur l'outrecuidant, je vous ai demandé de sortir, que sont donc ses mauvaises manières que voilà ?! Sortez je vous prie, mon habillage n'est point terminé !
- Oui oui, c'est très intéressant tout cela, mais voyez vous, j'ai une enquête à conclure et j'aimerai donc savoir ce qui vous amène dans un village que les habitants veulent fuir ?... pardonnez moi mais je n'ai pas bien compris d'où vous venez et qui vous a donné l'autorisation de pénétrer dans ce village ?
- C'est normal mOsieur l'outrecuidant, je ne vous l'ai pas dit, et pour toute réponse vous devrez vous contenter de cela pour enfin sortir d'ici : nous venons de l'Est faisant route vers Andride et ce sont les offices du Baron lui-même qui nous ont permis d'organiser cette fabuleuse représentation, à laquelle, je l'espère, vous assisterez, vous y serez mon noble invité... mais maintenant sortez je vous prie."

Tournant les talons, Briselame sortit. De mon côté, je me contentai d'observer la petite troupe en train de monter l'estrade. Je recensais l'ensemble : un intendant par ici, trois acteurs par là, Ezekiel dans sa caravane, un autre "monteur" de ce côté... Nous en sommes bien à six. La seule présence féminine qui semblait composer la troupe, à qui je m'adressa, une jeune femme à l'allure plaisante, vêtue de cuir et d'un chemisier ample, sérieuse et travaillant d'arrache pied, se nommait Mohanna, fille d'Ezekiel. Elle put m'apprendre que sa troupe vint de l'Est et avait, quelques jours auparavant, croisé le dénommé Youg, le colporteur, à qui ils commercèrent quelques menues babioles d'entretiens de costumes etc.

Quant à Olfias, ayant quitté sa troupe de gamins qu'il avait envoyé au recensement de tout objet incongru ou inhabituel, il alla se planter devant l'étrange "arbre qui chante" et ne trouva pas mieux que de déclamer à l'unisson la litanie qu'il avait précédemment entendue, chez De Loguenade et sous l'emprise de l'encenseur Keshite. Il y parvint à merveille, à tel point qu'il invoqua un esprit fort puissant et non moins redoutable... un OBSIDIEN !!!!!! Pas moins !

Olfias, stupéfait de la manifestation de son incantation qui se campait devant lui :
- ...oups... bonjour...
- Je suis Ofram et tu m'as appelé. Comme le veut Noxe, je serai ton Champion - Olfias chercha Dantros du regard, son diablotin infernal, afin de s'assurer qu'aucun débordement ne risquerait de troubler la petite représentation. Il le retrouva rapidement... dans les griffes du démon Obsidien qui se délectait de resserrer doucement son étreinte diabolique autour de son cou -
- As-tu trouvé l'Heliotron - reprit le démon -
- Heu, pas tout à fait, mais j'y travaille !
- Elle arrive - fit l'Obsidien songeur en faisant craquer les os de Dantros dont les yeux s'exorbitaient - Seul toi pourras mettre la main sur cet objet, mais le prix en sera le même
- Ha... combien ?
- Tu m'as appelé
- heu, oui, juste pour faire connaissance
- Et bien tu as toute ta vie pour cela maintenant - conclut le démon dans un mouvement brusque du poignet qui termina Dantros et le propulsa au sol - Appelle moi quand tu auras besoin de moi, je te ferai alors savoir ce qu'il t'en coûtera"

Ofram disparut, Dantros finit de cracher ses tripes, et Olfias se frottait les mains, réjouit de sa nouvelle rencontre.
 

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4. Le Masque à Farona

Olfias et moi nous retrouvâmes à l'auberge du village ou Briselame refusait obstinément de pénétrer. Décidément peureux sous ses airs de vaillant mercenaire le petit homme - songeai-je. Nous nous y installâmes, alors que Briselame préféra l'écurie, et nous retrouvâmes ensuite sur la grand-place du village pour assister à la représentation théâtrale de la troupe du "Fabuleux et grandissime Ezekiel", tel que lui-même se qualifiait. Il déclama sa présentation :

- La célébrissime troupe des Mille Facéties va maintenant vous interpréter une somptueuse pièce en trois actes intitulée "L'homme aux Mille Visages" -

Les trois coups sonnèrent, le rideau se leva sur d'étranges silhouettes, l'une féminine, deux autres masculines, un quatrième se tenant au fond et narrant la pièce : Ezekiel. Tous avaient le visage masqué, ce qui n'alla pas sans surprendre les Inspirés du coin (nous). Le récit semblait conter l'histoire de trois vagabonds, exilés de force ou fuyant quelque malheureuse aventure, et ayant trouvé refuge auprès d'un Prince en proie à une guerre qui déchirait son pays. Les trois étrangers, par d'extraordinaires et sombres pressions, purent convaincre leur hôte de suivre leurs conseils. Le drame fut que le Prince sera finalement terrassé par ses ennemis, emportant avec lui ses armées décimées sous l'emprise des fantasques conseils de ses trois prétendus compagnons.

La pièce fut subjuguante... voire même envoûtante, bien que sans morale. Olfias y détecta une Œuvre de la Geste, mais très probablement pervertie car son effet n'avait pour autre objectif que de charmer l'ensemble des spectateurs... dont Briselame et surtout moi qui eut un mal fou à me libérer de l'emprise de la pièce.

Sous le jour de cette nouvelle piste, convaincus que nous avions des agents du Masque en guise de troupiers saltimbanques, nous ne pûmes y détacher notre intérêt. Pourtant rien ne liait la troupe aux incidents du village intervenus une semaine plus tôt, mais le simple fait d'avoir ce genre d'individus à ce moment là dans les pattes nous suffisait pour nous en méfier (voire les éliminer... dès que nous aurions une connaissance exacte de leurs agissements).

Afin de remercier les acclamations déferlantes du public, Ezekiel lança à l'assistance :
"Tous à l'Auberge ! Ce soir nous fêtons mon succès" - de sa plus simple humilité !
Par Cysèle, je lui trancherai bien la tête sur place à ce bouffon de masqué !... Mais cela tombait très bien. Un clin d'œil d'Olfias me fit comprendre qu'il était bon que je reste avec le puant et précieux Ezekiel afin de surveiller ses mouvements, tandis qu'Olfias s'occuperait de farfouiller alentour.

Une fois la tumultueuse assistance établie à l'auberge en compagnie d'Ezekiel et de ses troupiers, Olfias s'infiltra discrètement dans la caravane du chef des saltimbanques après avoir nargué un espèce de chien tirant sur la laisse de son propriétaire, surveillant le périmètre. Dans un coffre, il récupéra cinq manuscrits qui semblaient être des pièces. Ayant rapidement fouillé le reste de la caravane, il en conclut que rien d'autre d'intéressant ne s'y trouvait. Il referma le coffre avant de sortir. Il se faufila dehors, enterra les parchemins non loin en hâte car apparemment traqué par le chien renifleur guidant son maître et se rapprochant dangereusement de lui. Fuyant vers un endroit isolé un peu plus loin, Olfias invoqua de nouveau "son Champion" d'Ofram (on a les amis qu'on mérite !). Sa requête fut de brûler la carriole d'Ezekiel, en échange de quoi le démon lui exigea pain rouge et vin bleu sur le champ, trouvant particulièrement amusant de goûter à ses victuailles uniques, sauf à Farona. Olfias se précipita vers l'auberge, commanda un pichet de vin et une miche de pain qu'il repartit offrir à son mandant. Ravi, Ofram lui promit d'accéder à sa requête. Olfias put ainsi retourner tranquillement s'attabler avec Ezekiel et moi pour participer à l'allégresse du pot en l'honneur du triomphe de la troupe pendant que l'équipement du saltimbanque se consumait.

Pendant ce temps, ne souhaitant surtout pas se mêler à la ribambelle de festoyeurs qui honorait Ezekiel et sa pièce (c'est que ça a son petit caractère un nain !), Briselame préféra s'intéresser aux alentours du village. Ayant repéré un feu à l'extérieur de Farona, Briselame s'y rendit après avoir été quelque peu malmené par des miliciens zélés qui gardaient sévèrement la quarantaine. Altercation qui ne dura pas grâce à l'intervention du Capitaine Gontran, Briselame découvrit une petite clairière au bord de laquelle un campeur faisait un feu. Étonné qu'un individu s'arrête si proche d'une ville, il s'adressa à lui :

"Bonjour Voyageur, je m'appelle Briselame.
- Bien le Bonsoir Sire Briselame, je me nomme Etilas - lui répondit l'homme.
Restant à distance du foyer, Briselame continua :
- Pardonnez ma curiosité Sire Etilas - réalisant qu'il s'adressait au mystérieux propriétaire du manoir décrit par mes amis de l'Équerre comme étant leur œuvre, et craint des enfants du village qu'ils estiment "hanté" - mais puis je savoir ce que vous faites, seul, ici ?
- Il se trouve que j'attends de la compagnie, j'ai un rendez-vous - répondit-il d'un ton sombre
Cherchant alentour la présence de quelqu'un, Briselame perçut six cavaliers en approche lente.
- Ha.. mmmh, je vois... je vous gène peut-être ? - interrogea-t'il.
- Cela dépend de vous Sire Briselame - répondit-il en mettant sa main sur le pommeau d'une épée et scrutant les environs, cherchant apparemment ses "compagnons".
- S'agirait-il d'un duel ou règlement de compte Sire Etilas ? Puis je vous être utile ou ma présence n'est elle pas conseillée ?
- Nous le saurons bientôt je crois - conclut Etilas.

Six cavaliers sortirent alors des ombres et s'avancèrent dans la clairière. L'un d'eux s'adressa à Etilas, quelque peu étonné de la présence de Briselame mais n'y prêtant pas plus d'attention (il aurait pourtant dû !), et réclamant un mystérieux dû que lui devrait Etilas contre les services de la compagnie de mercenaires qui les encerclait. Le mercenaire fit signe à trois de ses comparses de partir (en quête du fameux dû) au manoir d'Etilas, pendant que les trois autres tiendraient compagnie aux deux voyageurs. Je ne décrirai pas ici la boucherie qui s'en suivit. Seuls éléments intéressants de la barbarie qui eut lieu : trois mercenaires littéralement désolodiraisés de leurs membres, quelques égratignures pour Briselame et l'augure d'un grand nettoyage de sa hache à deux mains. Etilas s'en tirait à bon compte et gracia Briselame d'une invitation en sa demeure dès le lendemain. Devant partir sans tarder pour intercepter les trois autres mercenaires, ne requérant pas la présence de son sauveur de nain, Etilas s'en retourna précipitamment vers le village.

"Alerte ! Au feu ! Au feu ! - s'écrièrent les villageois accourant vers l'auberge.
Feignants la stupéfaction, Olfias et moi nous précipitions dehors pour constater le ravage des flammes dans la caravane d'Ezekiel qui devint subitement beaucoup moins plaisant et perdit aussitôt son emphatique prestance. Rouge de colère, il courut dans sa caravane en flamme et en ressortit avec son coffre qu'il tentait d'éteindre en y jetant des étoffes. Il y parvint, à notre grande déception. Olfias et moi contribuions fortement à faire cesser le feu, jetant à tour de bras des sauts d'eau, lesquels, malencontreusement, n'atteignaient que très rarement les foyers (arf, trop bête, encore raté !...). Ezekiel jura de retrouver le responsable, ayant, ô surprise, écartée de suite la thèse de l'accident. Nous lui promettions de l'y aider :

"Cela va de soi, Sire Ezekiel, vous pouvez compter sur mon entière participation pour estourbir le responsable de ce crime ! Parole de Zenekyn ! Je suis à Farona pour y rétablir l'ordre des choses !" (...me faut un endroit isolé pour m'éclater de rire... vite !).

La nuit qui suivit se déroula (presque) sans problème... si l'on écarte la désagréable impression que procure un environnement tout de nuances de gris qui envahissaient l'auberge ("appelez-moi le décorateur" - rigolai-je), et les cauchemars d'Olfias qui le sortirent de son sommeil, persuadé d'entendre "l'arbre chantant" l'appelé. Cette impression si réelle le motiva à aller le constater par lui-même à la fenêtre de sa chambre. L'arbre bruissait effectivement, engouffrant le faible vent dans ses feuillages. Mais un plus loin, sur la droite, il aperçut une silhouette avec un chien immense en train de renifler non loin de l'endroit où il avait enterré les parchemins d'Ezekiel, plus tôt dans la soirée. Craignant qu'ils ne découvrent la cachette, Olfias descendit discrètement et suggéra à Dantros d'aller récupérer son forfait tandis qu'il détournerait l'attention de l'intendant d'Ezekiel qui rôdait alentour.

S'exécutant, Olfias n'eut point le temps d'émettre un son et se fit charger par l'atroce chien libéré de sa laisse. A l'aide de sa canne, Olfias tentait de l'estourbir (en vain) jusqu'à ce que Briselame et moi n'intervenions. Deux coups de hache (pas encore nettoyée de sa précédente découpe dans la clairière) suffirent à Briselame pour trancher une jambe de l'intendant alors que je tentai d'en finir avec l'immonde "Seigneur rat" que l'on prenait pour un chien. Alors que je mettais le feu à l'infecte dépouille du rat géant grâce à quelques pigments, Dantros parvint à récupérer les parchemins que son maître avait enfoui et les lui rapportait, se faufilant discrètement parmi la foule de badauds venue contempler la raison du dérangement nocturne. Désolé de constater que le sombre intendant de la troupe d'Ezekiel venait d'agoniser de sa jambe tranchée, nous profitions que le jeune et arrogant Ikum, membre de sa troupe, s'était approché pour lui demander de justifier des méfaits de leur intendant et de la présence de l'infernale bestiole qui nous avait pris pour cible. Il se débarrassa de nos questions par un simple :
"Ho vous savez, cela fait peu de temps que nous avons engagé cet intendant. Nous étions quelque peu suspicieux à son sujet mais il travaillait bien. Et concernant le "rat" comme vous dites, et bien il me semblait tout a fait apprivoisé !".

Non satisfaits de sa réponse, Briselame et moi décidions d'en alerter la garde postée autour du village afin d'en interdire strictement la sortie, en particulier à la troupe de théâtre dont les représentations devenaient de plus en plus sombres ! Le Capitaine Gontran promis que rien ni personne ne sortiraient de son cordon de miliciens et qu'il nous ferait prévenir si le cas se présentait. Nous pouvions enfin retourner finir notre nuit.
 

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Acte III :
Récit :  Zenekyn Kahan

Quand Noxe déjoue le Masque

Désormais certains que l'Ombre et  l'intriguant de Masque étaient tous deux mélés à cette sombre affaire, il nous fallait encore savoir qui tirait les ficelles et à qui profitait le crime. Choses bien peu aisées si l'on considérait le nombre important d'éléments dont nous disposions et qui nous envoyaient sur des pistes toutes différentes. Il paraissait donc évident que quelqu'un s'amusait délibérément à brouiller les pistes. Mais qui ?
 

1. Sombres Oeuvres

Au petit matin, nous nous préparâmes en hâte afin de faire le tour des différents sites que nous devions visiter : la Tour de Guêt, le Manoir (Briselame y était invité), la forge, le puits sans fond, le ménil, l'échoppe plongée dans la nuit... Mais dès notre sortie de l'auberge, nous fûmes mandés en hâte au poste de la milice à la sortie de la ville. Le milicien nous expliqua que la troupe de théatre semblait pressée de quitter les lieux. Nous nous y rendîmes au galop.

Les deux caravanes de la troupe (sur trois... les incendies font de tels ravages !) étaient stopées au poste de garnison du Capitaine Gontran. Heureux de constater que l'officier avait strictement observé nos requêtes, nous mîmes pied au sol. Je constatai avec effroi qu'il manquait deux montures à l'attelage. Ikum était en train d'arranguer la petite troupe de miliciens qui lui refusaient le passage. Après quelques tentatives de marchandage financier, tant à mon égard qu'à celui du Capitaine, je décidai de m'assurer que les carrioles resteraient sur place en "fusionnant" discrètement les harceaux aux chassis (petite Oeuvre très utile de Cysèle). Après quoi j'entreprenai de fouiller toutes les immenses calèches, ignorant les invectations, refus et colère d'Ikum. Evidemment, Ezekiel et sa fille Mohanna avaient disparus. Mais ce ne fut pas la seule chose que je pus constater : dans le contrefond d'une des caravanes, je trouvis d'étranges objets rituels : une fiole remplie d'un liquide vert, un crâne apparamment humain et un épais livre titrant en Septentrion "Principes fondamentaux de la Discorde". Olfias qui en avait déchiffré le titre ne préféra pas continuer plus loin sa lecture. Cela nous semblait également plus sage.

Ikum se défendit d'avoir connaissance de ses objets. Mais une petite "psychométrie" éxecutée par Olfias sur la flasque verte lui permit de retracer les émotions et gestes exécutés ces dernières heures en relation avec l'étrange caraffe : une main fébrile, un sentiment de besoin vital d'une femme, la peur. Nous en concluions que le flacon contenait des soins ou une drogue quelconque vitale à Mohanna.

Nous avions également trouvé bon nombre d'armes et coutelas qu'Ikum justifia en revendiquant qu'il s'agissait d'accessoires de spectacle. Voulant le vérifier, nous avons pris le risque de demander à Ikum de nous faire une démonstration des "divertissements" que l'acteur proposait avec des coutelas (numéros de jonglerie nous précisa t'il... tiens donc, notre interprète sait donc tout faire !). Il éxecuta une parfaite jonglerie avec six couteaux qu'il conclua en les planta tout autour de moi sur la caravane. "Et bien, vous voyez bien que je sais parfaitement m'en servir messieurs, cela vous suffit il ou dois je vous éxecuter d'autres tours" menaca t'il. Convaincus du danger que cet homme représentait avec ses coutelas, nous lui accordions le bénéfice du doute tout en l'assignant à demeurer à Farona tant que notre enquête n'avait pas aboutie. Gromelant et contestant, nous le laissions derrière nous et retournâmes à Farona.
 

La Tour de Guêt

Notre première visite fut cette tour, construite par l'Ordre de l'Equerre à l'époque où Farona fut établie. Moins ancienne que le Manoir, elle nous parut intéressante à visiter. Briselame semblait quelque peu troublé par ce monument et ne se sentit pas de nous y accompagner, préférant nous attendre à l'extérieur. Olfias et moi montions donc le long d'un gigantesque escalier qui s'enroulait au sein des parois de la tour. A son sommet totalement découvert, nous constations l'étrange pouvoir de cette oeuvre : nonobstant le fabuleux point de vue qu'elle offrait sur la région, elle permettait, en fixant un point précis, d'avoir l'impression d'y être et ainsi de l'observer d'autant plus près. Pouvoir impressionnant ! Olfias et moi testions différents points précis du village et alentour. Franc succès pour la capacité d'agrandissement de l'oeuvre !

Décidant de nous en retourner, notre surpirse fut grande : un second escalier que nous n'avions pas remarqué au préalable semblait s'être ouvert sur le parvis du toit. Curiosité saine (nous l'éspérions), nous l'empruntâmes pour redescendre par ce chemin. Au milieu de la descente, une pièce débouchait sur l'escalier. Petite visite des lieux : de grandes armoires, une tenture aux étranges reflets, une carte de la région marquée de croix ça et là semblaient indiquer le parcours des orages... ou du Messager de Noxe, et une bougie toujours allumée qui ne semblait pas se consumer. Olfias s'intéressa à la tenture représentant un paysage relativement sombre montrant une petite cascade dévalant les rochers et finissant dans un lac dont les reflets de l'eau semblaient vivants. Un tableau monde, à n'en point douter. Olfias y expédia Dantros. Le diablotin revint un peu plus tard expliquant qu'il était sorti par le fameux puits sans fond. Nous imaginions alors que ce tableau possédait la faculté de ce rendre aux divers endroits troublés du village. Nous décidions cependant de ne pas pousser l'expérience plus loin. Une seconde pièce nous attirait mais, voulant nous y rendre, nous eûmes le sentiment de nous perdre.

Briselame, patientant depuis un long moment à l'extérieur, entendit Olfias et moi l'appeler à nous rejoindre. Il décida courageusement de pénétrer dans la tour. Se rendant sur le toit tout en nous appelant, il émergea dans une tempête de vent (alors que le ciel était clément quelques instants plus tôt). Il tomba nez à nez avec un de ses redoutables ailleuls ! Nécromancie ou hallucination ? Toujours est-il que l'ancêtre en question provoqua Briselame et engagea un étrange comba apparament destiné à estimer la bravoure de notre compagnon. Souhaitant, pour une fois, rompre avec son habitude de démembrer ses opposants, Briselame tenta d'habiles feintes dont le but était de démontrer ses talents de combattant. Malheureusement, son ailleul ne semblait pas avoir le même objectif et lui enfonca le crâne de son impressionnant marteau. Briselame sombra, inconscient.

Olfias et moi ayant enfin retrouvés notre chemin, nous décidions de ressortir par le toit et de reprendre l'escalier qui nous avait paru moins surnaturel. Arrivant au rez-de-chaussée, ô surprise, Briselame gisait sur le sol, le pied pris dans un pavé émergeant du sol et arborant une somptueuse bosse en forme d'oeuf. L'aidant à reprendre connaissance, nous ne pûmes retenir quelques sarcasmes et petites moqueries : "Tu t'es pris les pieds dans ta robe ? Tu aurais dû t'en faire tailler une à ta taille peut-être !". Briselame parut choqué... rien d'anormal à cela à en juger par son hématome. Sortant tous trois de la Tour, nous tombâmes nez-à-nez avec un nain arborant une simple toge et semblant tout aussi surpris que nous. Je reconnus quelques signes distinctifs qui me firent aussitôt penser qu'il appartenait à l'Equerre. L'espion de l'Ordre très certainement envoyé par Ogul, le maître que j'avais rencontré à Andride.

"Méfranc je présume ?" - demandai-je. Acquiescant, nous fimes connaissance tout en retournant vers le village. 


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La Forge molle

Décidant de nous intéresser aux autres sites perturbés du village, nous nous rendîmes à la forge qui ne fonctionnait plus, au grand damne de son propriétaire qui comblait son temps libre par l'ingestion démesurée de vin. Balbutiant sa colère, tentant de le raisonner, je me retrouvis avec son poing collé au milieu de la figure... Renfrognant une réaction violente, je lui suggéra de retourner se coucher en attendant d'autres nouvelles et lui promettant d'essayer de remédier au problème de son établissement. Fouyant la totalité de l'échoppe, testant quelques menus travaux de forge, nous constations le désastreux effet du lieu : les objets travaillés ici en sortaient bel et bien mous. Briselame fut attiré par l'âtre qui lui paraissait étrange. Retournant braises et cendres, il découvrit (par Cysèle... infection !) un sombre danseur attaché aux chenais du brasier. Se tordant de douleur, agonisant de son petit bras tranché (par Briselame fouillant avec sa hache), je ne pus retenir un soupir de soulagement. L'étrange créature magique périt rapidement. Briselame la récupéra et la fourra dans un petit baluchon de tissu. Débarrassé du danseur, je testai à nouveau la forge tandis que mon compagnon attisait de nouveau l'âtre. Grand succès, la forge était rétablie. Nous en fîmes part au garçonnet qui nous accompagnait afin qu'il annonce la nouvelle à son père, le propriétaire du lieu, dès qu'il aurait cuvé sa vinasse.
 

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Le Manoir d'Etilas

Passant non loin du "puits sans fond" du village, nous y croisâmes Méfranc en train d'examiner les lieux. Après quelques essais de jet d'objets et torches pour constater le problème, nous lui confiions le danseur et décidions d'aller rendre visite à l'hôte de Briselame qui l'attendait en son manoir.

A notre arrivée devant l'impressionnante demeure du Seigneur Etilas, trois montures - probablement celles des mercenaires de la veille - étaient encore attachées sous le perron. Nous fîmes le tour de l'ancestral bâtiment. A l'opposé de l'entrée principale nous y trouvâmes une clé de voûte surmontant une porte basse et arborant le sceau de l'Equerre. Briselame en recopia le symbole, parcouru d'un étrange sentiment de "libération".

Finissant le tour du propriétaire, nous montâmes les marches du perron de l'entrée et, avant même d'avoir toqué à la porte d'entrée, celle-ci s'ouvrit… Magie que tout ceci ! Un vieux et grisonnant majordome se trouvait derrière elle et nous invita à le rejoindre. Ce faisant, la porte se referma derrière nous. Je n'y détecta pourtant aucun mécanisme particulier. Le majordome nous fit asseoir dans un petit salon richement décoré de vieux portraits représentant apparemment les ancêtres de notre hôte, de bibliothèques recouvertes de livres, d'un petit bar et de mille objets aux allures baroques.

Olfias, désormais spécialiste de l'art de la psychométrie, s'y essaya de nouveau sur le miroir pendant que j'inspectai les moindres objets et analysaient les portraits en détail. Olfias vit cinq événements successifs qui retraçaient les émotions des dernières personnes ayant regardé le miroir : Felagh, le mage corrompu, avec des yeux de fous (il était déjà trop tard pour lui) face à Etilas, calme et serein ; Etilas feuilletant un grand volume manuscrit ressemblant à s'y méprendre aux "Principes fondamentaux de la Discorde" que nous avions récupéré dans la caravane d'Ezekiel ; Le majordome d'Etilas replaçant sept livres dans un ordre bien précis dans les rayonnages de la bibliothèque ; trois mercenaires pénétrant dans la pièce, troches à la main, subitement éteintes et un sentiment de peur s'échappant de leurs esprits.

Sire Etilas se fit introduire par son majordome à ce moment là. Surpris que Briselame fusse accompagné, il n'y vit cependant point d'inconvénient. Nous pouvions enfin le questionner, car après le rapport qu'Olfias nous avait fait de ses visions concernant ce lieu, notre hôte nous paraissait bien plus intriguant qu'auparavant. Etilas conserva un sang froid des plus déroutants durant tout notre petit interrogatoire :

"Vous connaissiez donc le magicien Felagh ?
- Oui, il venait travailler ici, il souhaitait étudier l'Heliotron
- Ha ? Donc il est ici ? Nous est il possible de le voir ?
- Je ne crois pas que ce soit possible, on ne vous l'a pas permis.
- Et à qui faut il le demander ?
- Je ne sais pas, je ne suis que le "dépositaire et garant" de cet objet qui m'a été confié. Il est très dangereux. Felagh en a payé de sa propre raison.
- Voui… et qui sont les propriétaires de l'Heliotron ?
- Tout ce que je sais c'est que cet objet est ici pour y être protégé, nous y sommes engagés.
- Qui ça "nous" ?
- Cette maison et moi même.
- Ha. La maison. Mais bien-sûr. Et comment s'appelle t'elle d'ailleurs ?
- Hurlevent.
- Joli nom. Pourquoi, à votre dernière entrevue avec le félon d'Ezekiel paraissait-il en colère ?
- Ho vous savez, je ne partageais pas son point de vue sur différentes choses qui lui étaient chères, comme le théatre par exemple.
- Et quel était le livre qui semblait être au milieu de cette dispute ?
- Je ne sais plus. Il y en a tellement ici - balayant d'un geste théatral ses innombrables rayonnages -
- Ha. Bien sûr…

Etilas continua assez longtemps à ce petit jeu sans nous laisser le moindre avantage ni nous permettre de visiter sa maison et encore moins l'Heliotron. Il eut même la délicatesse de nous offrir un verre et de la boire avec nous. Briselame s'approcha d'une porte au fond de la pièce qui s'ouvrit devant lui. Comme attiré par l'endroit il y pénétra et déambula dans la maison en des endroits que nous ignorons totalement, après, bien sûr, qu'Etilas lui ait garantit que "si sa demeure lui ouvrait ses portes, il ne tenait qu'à lui de la visiter". Nous ne revîmes Briselame que quelques deux heures plus tard, à notre sortie du bâtiment, arborant un magnifique marteau de guerre… Etonnés, nous lui demandions d'où provenait cet ustensile qu'il ne possédait pas avant notre visite, sur quoi il nous répondit qu'il "devait" le "récupérer". Nous devions nous contenter de sa réponse. En y regardant d'un peu plus près, il n'y avait aucun doute que ce marteau était une magnifique œuvre datant de la Flamboyance… pas moins !

Nous en revenant vers l'auberge, nous la trouvâmes encerclée par les miliciens : un meurtre venait de s'y produire suite à des altercations (très fréquentes dans l'auberge depuis qu'elle avait perdu ses couleurs, ce qui avait le don d'agiter ses occupants) qui avaient mal tournées.

Patientant le temps que l'ordre y soit rétabli, nous nous attablions pour, enfin, tenter de comprendre ce que les cinq pièces d'Ezekiel, qu'Olfias avait dérobées et enfouies la veille, recelaient comme secrets. Il s'y colla et y détecta de nombreuses œuvres, l'une fortement pervertie, l'autre permettant de voir le passé, une autre incompréhensible et deux sans aucun pouvoir. Nous décidâmes alors de toutes les brûler sans exception, et sur le champ.

Tandis que le soleil se couchait, Briselame et moi nous rendîmes dans un coin tranquille du village, non loin de l'auberge, et disposions les parchemins sur quelques brindilles que j'enflammai avec mes précieux pigments d'été afin d'en assurer la totale combustion. Ikum se tenait non loin et nous observait, flanqué d'un de ses acolytes. Il émit un regard pressant et inquiet dès qu'il eût réalisé nos intentions et compris qu'il s'agissait des œuvres de son maître Ezekiel. Un couteau fila de sa main en direction de Briselame. Celui-ci se précipita vers son agresseur, ignorant son acolyte qu'il trancha dans son sillon. Mais Ikum n'était pas seulement un excellent lanceur de couteaux mais également un très bon athlète qu'il fut impossible de rattraper. Briselame et le malfrat jouèrent ainsi à cache-cache dans le village pendant quelques minutes, se poursuivant tour-à-tour, tentant de s'éviter ou de jouer la cible d'une dague ou d'une hache. Quant à moi, m'assurant que le feu prenait correctement et planté sur mes deux pieds à le surveiller, j'aperçus un troisième larron allongé sur le toit de l'auberge et braquant une arbalète lourde dans ma direction. Esquive, hurlement à l'attention d'Olfias qui se trouvait dans l'auberge pour aller le déloger, ce qui me donnait le temps de créer quelques pics de glace destinés à mon arbalétrier. Olfias surgit sur le toit et se précipita sur l'homme, ne pouvant éviter une belle estafilade au couteau. J'en profitai pour me précipiter dans l'auberge pour les rejoindre, avala l'escalier conduisant sur le toit et me précipita sur notre homme dont je trancha le bras. Agonisant puis perdant connaissance, la vie lui échappait, je décidai donc de m'en servir comme bouclier humain afin d'éviter les coutelas qu'Ikum, revenu de sa partie de cache-cache avec Briselame, nous adressait généreusement. Il disparut finalement derrière une maison. Je lâcha mon bouclier qui s'écrasa au sol puis je retourna dans l'auberge où Briselame et Olfias se firent soigner par Mefranc.

Celui ci en profita pour nous donner quelques éléments qu'il avait réunis au sujet du manoir : il avait été construit il y a plus de huit cents ans par un nain de l'Equerre nommé Dokram, répudié ensuite pour une raison inconnue, Hurlevent conférait à son propriétaire le pouvoir de rester isolé tout en gardant un contact avec l'extérieur grâce "aux vents" (d'où son nom). Bien étrange légende.

Nous pûmes également apprendre que l'Heliotron est une statuette représentant une femme dotée de quatre visages et ayant la faculté, manipulée par des inspirés, d'influer sur le jour et la nuit. Egalement que "Mélopée est le fille de la nuit" et qu'un certain "rite d'Uzul" consisterait à déclamer une incantation mélodieuse pour invoquer un démon capable de manipuler l'Heliotron. Terrifiant ! Il nous parut donc clair que Noxe jouait une partie stratégique dans cette affaire.

Nous en déduisîmes ainsi que la présence d'agents du Masque se justifiait par l'intérêt qu'il portait aux manigances de son partenaire et sujet, l'Ombre. La troupe de théâtre investiguait donc probablement sur les réminiscences de Noxe à Farona alors que le Masque n'en était point informé. Peut être que l'Intriguant craignait des activités de l'Ombre. Dissension très intéressante à laquelle nous nous promîmes de contribuer !

Alors que nous discutions de cela attablés autour d'un repas, Briselame, pris d'une subite envie biologique, se leva pour aller la soulager aux urinoirs. Passant la porte donnant sur la cour de l'auberge, il se retrouva avec un poignard sous la gorge et la voix d'Ikum lui susurrant à l'oreille :
"Dis moi où se trouve l'Heliotron où je te tranche la carrotide"

Tentant de tergiverser avec son agresseur, Briselame profita d'un instant de distraction d'Ikum et de sa différence de taille pour fuir son étreinte hostile. Ikum se retrouva au sol après avoir tenté d'effilocher le nain. Briselame profita de s'être projetté loin d'Ikum pour dégainer sa hache et le tailler en deux. Deux coups suffirent. Nous étions enfin débarrasser d'un agent de la perversion.

Suite à cet événement et en considérations des informations et suppositions que nous avait communiqué Méfranc, nous envisageâmes de retourner à Hurlevent et de mettre la main sur l'Heliotron, mais sans moyen d'éviter Etilas qui nous en interdirait probablement l'accès. Olfias eut l'idée d'aller (enfin !) interroger le garçonnet tombé malade à la suite d'une rencontre avec un objet insolite dans le manoir. Se rendant à son domicile, Olfias l'interrogea. Le gamin ne se souvint malheureusement plus de ce qu'il avait vu précisément, à l'exception du soupirail par lequel il avait discrètement pénétré dans le Manoir.

Olfias prit ensuite soin d'invoquer son Champion avant de tenter quelque mauvaise action qui pourrait nuire à sa santé. Nous fûmes donc couverts par "Wolverine" du haut de ses quelques deux mètres (peut être plus, nous ne sommes plus à quelques centimètres près) et de ses tranchantes griffes comparables à de l'acier. Olfias lui demanda d'intervenir dès que sa vie serait en danger. Olfias ne dut pas juger la protection suffisante et déclama une petite œuvre très utile en ces termes : "Je ne serai pas là lorsque ma Compagnie sera menacée". Nous pûmes continuer notre progression sous la haute protection de Wolverine, et totalement rassurés sur l'avenir proche d'Olfias (le notre paraissait moins évident).

Nous étions donc décidés à pénétrer chez Sire Etilas par le fameux soupirail. Arrivant devant l'auguste demeure, Etilas nous y attendait déjà, sur le perron de l'escalier. Il invita Briselame à rentrer dans les lieux qui s'ouvrirent devant lui et s'excusa de devoir nous refuser l'accès car "Hurlevent ne nous le permettrait pas". Etilas et Briselame disparurent derrière la grand-porte qui se referma magiquement après leur passage.

Songeant à faire le tour afin d'atteindre le soupirail, la silhouette de Mohanna (la fille d'Ezekiel en fuite) se détacha de l'obscurité, un arc dans les mains. Me prévenant de ma perversion imminente qu'elle avait "vu", elletrépassa rapidement sous les griffes de Wolverine après avoir lâchement tenté de m'adresser une de ces flèches que j'esquiva avec une facilité déconcertante.

Nous pénétrâmes dans l'antre et retrouvâmes Briselame à l'intérieur qui nous permit, guidé je ne sais comment par Hurlevent, d'atteindre un grand couloir finissant par une lourde double porte en métal massif. Ne pouvant l'ouvrir par aucun moyen mais persuadés que l'Heliotron se trouvait derrière, nous songions au moyen de l'ouvrir quand Briselame, sujet d'une sorte de transe subite, dégaina une lame et grava le sceau de Dokram dans l'acier, au plus grand supplice de nos oreilles. En tout cas le résultat fut efficace. Les lourdes portes s'entrebâillèrent sur une pièce au fond de laquelle un grand halo noir dissimulait très certainement l'objet que nous cherchions. Après de longues hésitations, Briselame, Olfias, son démon de garde du corps et moi même pénétrions dans la "bulle de noirceur" qui enveloppait l'endroit. Nous y découvrîmes la statuette aux quatre visages que nous nous empressâmes d'emporter. J'en assuma la responsabilité.

Un grondement qui fit trembler toute la maison nous fit comprendre qu'il nous fallait nous hâter : Hurlevent manifestait sa colère. A ce moment là, le géant démon empoigna Olfias et ils disparurent tous deux. Son œuvre fonctionnait, mais du coup ne présageait rien de bon pour "la Compagnie"… qui ne comptait plus que Briselame et moi. Mon nain de compagnon, connaissant déjà les lieux, me guida vers une autre sortie. Déboulant dans une pièce éclatante (ça change de l'obsurité !), il m'ordonna de surtout ne regarder que mes pieds. Tentant de m'y employer, Psydre (mon épée) se réveilla de nouveau et me suggéra de constater l'œuvre que j'avais toujours recherchée : une flasque alliant parfaitement pigments et alliages des Muses, composants rêvés pour réaliser la fusion parfaite des deux Arts que je maîtrisais. Je ne pus y résister et m'empara de la flasque, ignorant les réprimandes de mon compagnon. Je n'aurai pas dû : il m'apprit que cette flasque, comme toutes les autres œuvres de cette pièce, étaient perverties. Mais encore une fois je ne pus me résoudre à l'abandonner. Psydre m'y incita.

Nous pûmes enfin sortir d'un seul morceau par le sous-bassement qui se trouvait sous la clé de voûte derrière le manoir. Briselame n'avait pas tout a fait finit son travail : il empoigna son flamboyant marteau et frappa un coup terrible au point de clé, là où se trouvait le sceau du nain corrompu Dokram. Nous nous empressâmes de fuir les alentours en évitant les pierres et débris projetés par le manoir en train de s'écrouler.

Nous retrouvâmes Olfias et son (ses) démon(s) sur le chemin qui nous ramenerait au village, alors qu'une immense troupe de cavaliers de la nuit chevauchant leurs ténébreux palefrois (j'eus du mal à rester conscient tant le choc avec les ténèbres fut violent) nous dépassait dans le vacarme de leur galop. L'un d'eux s'immobilisa devant nous pour nous faire savoir que nous étions attendus "par qui nous savons" au puits. Nous nous y précipitâmes.

Autour du puits, la centaine de cavaliers des ténèbres encerclait Mélopée, fille de Noxe, aussi terriblement belle que sombre, que nous reconnûmes aussitôt.

Elle nous salua, nous remercia, et nous demanda de confier l'Heliotron à Ofram qui apparaissait, sortant du puits. Tentant d'y renoncer, elle nous fit la promesse qu'aucun mal nous serait fait si nous y consentions. Nous lui demandâmes de jurer sur l'amour qu'elle vouait aux humains (nous le savions, étant mi-humaine et mi-démon et se jouant avec adresse et saveur des plans de son père et du Masque) de veiller à ce que jamais ne soit employé cet objet à mauvais escient à l'encontre des œuvres des Muses et de l'Harmonde. Elle nous le promit et remit l'Heliotron à Ofram, nous garantissant qu'elle commencerait immédiatement à réparer les méfaits de ses pairs.

Des gerbes de lumière jaillirent des huit yeux de la statuette, tendue au bout des griffes d'Ofram. Le village en fut inondé. Puis le rayonnement cessa. Mélopée nous offrit d'accéder à l'une de nos demandes afin de nous témoigner sa reconnaissance. Je lui suggéra personnellement de tenter de remédier à la perversion qui infectait la flasque que j'avais prise plus tôt dans le manoir, lui témoignant que ce serait pour moins la plus belle preuve de l'amour qu'elle conférait en l'Humanité. Elle s'y employa et y parvint. Les cavaliers de l'enfer nous ouvrirent le passage. Nous passâmes notre chemin alors que la troupe se mit en branle et prit le galop. Farona était ressuscitée. L'Ombre et le Masque avaient été déjoués.

Fin.
 
 
 

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